Une étude réalisée à l’UQAM se penche sur les malaises interculturels
Le 2 octobre 2023 – Humeur négative, anxiété, stress, inconfort, impression de marcher sur des œufs: voilà quelques-unes des émotions ressenties lorsque l’on interagit avec une personne d’une culture différente de la nôtre. C’est ce que révèle une étude dirigée par la professeure du Département de psychologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) Marina Doucerain, en collaboration avec le professeur du Département d’éducation et pédagogie Simon Grégoire et l’étudiante au doctorat en psychologie Laurence Morin. L’étude a été publiée dans la revue International Journal of Intercultural Relations.
Quatre-vingt-dix-sept étudiantes et étudiants universitaires ont participé à l’étude, qui s’est déroulée sur 21 jours. Les participantes et participants devaient prendre quelques minutes en soirée pour noter toutes leurs interactions de la journée avec des personnes de cultures différentes – que ce soit en classe, au travail, dans l’autobus ou au gym – ainsi que leur état d’esprit. «Les journées où l’on rapportait plus d’interactions avec des personnes d’une autre culture étaient aussi celles où l’on observait davantage de détresse psychologique», souligne Marina Doucerain, qui définit la détresse psychologique comme un sentiment global de mal-être pouvant se manifester par du stress, de l’anxiété ou de la déprime, par exemple.
Des codes différents
Bien que la société valorise l’ouverture aux autres cultures, la majorité des personnes ont très peu d’interactions interculturelles dans la vie de tous les jours. «Interagir avec des gens d’autres cultures peut être très exigeant mentalement, mentionne la professeure spécialisée dans la diversité culturelle, les relations intergroupes et le vivre-ensemble. Nous avons des codes différents, donc nous ne sommes pas toujours sur la même longueur d’onde. Parfois, une personne dira quelque chose qu’on a du mal à interpréter, ou alors on n’osera pas dire ce que l’on pense de peur de l’offenser.»
Marina Doucerain ajoute que l’incertitude causée par ces différences se poursuit souvent même après l’interaction. «Les interactions qui causent un malaise continuent d’occuper nos pensées, dit-elle. On se demande si l’on a bien agi, si l’on a dit la bonne chose et si l’autre a mal interprété nos paroles. Gérer cet inconnu est demandant sur le plan cognitif.»
À l’ère de la cancel culture, la peur des répercussions négatives est bien réelle. «Beaucoup de personnes du groupe dominant – soit les Blancs francophones au Québec – ont peur d’être perçues comme étant racistes si elles disent la mauvaise chose, affirme Marina Doucerain. Or, si l’on ne fait que parler de la pluie et du beau temps, on ne crée pas de relations très authentiques.»
L’étude de l’UQAM va dans le même sens que d’autres études réalisées ailleurs dans le monde. «La plupart des études antérieures ont été menées en laboratoire avec des interactions scriptées, souligne la chercheuse. L’originalité de notre étude est qu’elle confirme que les interactions interculturelles sont difficiles dans la vie quotidienne.»
Tolérer son inconfort
La professeure affirme que la meilleure façon d’améliorer nos interactions interculturelles est de persister. «C’est comme un nouveau muscle que l’on entraîne, illustre Marina Doucerain. Plus on interagit avec des gens d’une autre culture, plus on est à l’aise et plus les interactions sont positives. Il faut tolérer son inconfort et continuer.»
Les aspects positifs des échanges interculturels sont bien documentés, ajoute la chercheuse. «Dans les milieux de travail, par exemple, l’interculturalité peut amener plus de créativité et de flexibilité cognitive, ce qui aide à faire face aux imprévus et à gérer des situations complexes.»
La professeure compte donner une suite à l’étude. «J’aimerais que l’on puisse différencier les émotions ressenties avec des inconnus et des gens qu’on connaît bien, conclut-elle. J’aimerais aussi que l’on puisse évaluer les interactions interculturelles à travers le temps.»
Cet article a d’abord été publié sur Actualités UQAM le 14 août 2023.
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Source :
Joanie Doucet
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