Repos et résistance collective : La Galerie de l’UQAM accueille l’exposition «De la vie au lit»

Commissaire : Sarah Heussaff
Artistes : Cindy Baker, Tamyka Bullen, Liz Crow, Octavia Rose Hingle, Salima Punjani, Rea Sweets
Dates : 23 février 2024 — 6 avril 2024
Vernissage : 22 février 2023, 17 h 30 (Webdiffusion en direct sur le site web de la Galerie de l’UQAM)

Cindy Baker, Crash Pad, 2016, sculpture et performance. Photo : Stephanie Patsula
Octavia Rose Hingle, Bodyfabric (arrêt sur image), 2020, art vidéo, 7 min 24 s

Le 6 février 2024 — La Galerie de l’UQAM débute l’année 2024 en force en présentant l’exposition collective De la vie au lit. Au sein de l’exposition, le lit et son chevet deviennent des espaces de transmissions, de partages de blessures intergénérationnelles ou encore de moments romantiques et amicaux. En faire l’expérience induit de nouveaux rapports au corps et à des gestes chorégraphiques. Dans le projet, la rencontre de divers médiums artistiques s’inscrit aussi en réaction à l’injonction capitaliste de surproduction qui stigmatise les corps allongées et/ou qui vivent des incapacités chroniques.

L’exposition
Le temps passé au lit, qu’il soit temporaire, occasionnel ou permanent, procure du repos et soulage les douleurs ou la lassitude induites par la maladie, l’incapacité ou la dépression. Dans l’inconscient collectif, et parce qu’elle est souvent effectuée dans un espace privé ou domestique, une activité alitée relève de l’intime. En effet, la philosophie, l’histoire de l’art et les terminologies occidentales ont longtemps fait de l’alitement et de l’acte physiologique de s’allonger des figures de lascivité, de paresse ou de fainéantise. Elles ont aussi durablement réduit les espaces privés à des faits d’individualités apolitiques. Selon les attentes capacitistes et capitalistes, qui favorisent les corps et les esprits non handicapés ou non malades de la main-d’œuvre, le lit serait strictement — pour qui y a droit — un lieu de récupération au nom d’une meilleure productivité et d’une meilleure reproductivité. Ces dernières veulent nos corps féconds, réguliers, debout et au travail.

Liz Crow, Bedding Out, 2012-2013, performance. Photo : Matthew Fessey/Roaring Girl Productions.

Or, envisager les expériences vécues au lit à travers un aspect exclusivement performatif éclipse les réalités handicapées et malades pour lesquelles le lit ne représente pas seulement un outil de (re)productivité, mais bien un lieu de quotidienneté — on y mange, on y dort, on y vit nos loisirs ou, même, on y travaille. Le lit est aussi un espace de rencontres, en ligne et hors ligne, depuis lequel on communique en dehors et en dedans, rassemblant ainsi une communauté d’appartenance avec laquelle sont célébrées forces et vulnérabilités. La vie passée au lit est le moyen par lequel l’inaccessibilité se contourne avec douceur et résistance. Ainsi, les vies allongées ne se situent pas hors du monde par le fait même qu’elles sont vécues au lit. Au contraire, elles sont des manières d’y habiter.

Rea Sweets, vue de l’installation Love My Dysfunctions, 2020. Photo : Rea Sweets
Salima Punjani, The Cost of Entry is a Heartbeat (arrêt sur image), 2020, video, performance. Photo : Salima Punjani

Les artistes participant à l’exposition collective De la vie au lit embrassent des réalités et des identités diverses et intersectionnelles. Leurs pratiques abordent de manière transversale et créative les thématiques relatives aux expériences d’une vie au lit, du repos ou de la résistance aux normes. De la vie au lit est à la fois objet, chevet, chambre à soi, prétexte ou encore espace matériel et symbolique dans lesquels faire également l’expérience, collectivement, du témoignage et du recueillement. Les œuvres présentées ont une existence physique dans l’espace de la galerie et en ligne. Pour contourner les contraintes de l’inaccessibilité à laquelle le monde de l’art n’échappe pas, plusieurs entrées sensorielles aux œuvres ont été pensées afin de faire l’expérience d’un ou de plusieurs accès en adéquation avec qui l’on est.

De la vie au lit s’envisage telle une archive de nos présents handicapés, sourds et malades dans laquelle cultures et futurs ne sont pas déniés.

À propos des artistes
Cindy Baker est une artiste installée dans l’ouest du Canada dont le travail interroge les discours liés au queer, au genre, à la race, au handicap, à la grosseur et à l’art. Engagée dans une démarche communautaire éthique et une réflexion sociale critique, la pratique interdisciplinaire de Baker, articulée autour de la recherche, se nourrit de vingt-cinq années de travail, de bénévolat et d’organisation au sein des communautés dont elle fait partie. Elle évolue avec fluidité entre les arts, les sciences humaines et sociales, privilégiant les aspects théoriques et conceptuels aux préoccupations matérielles. Baker est diplômée d’un MFA de University of Lethbridge, où elle a reçu une bourse du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) pour ses recherches sur la performance en l’absence du corps de l’artiste. Elle a exposé et performé à travers le Canada et à l’étranger. Au cours de sa carrière, Cindy Baker a contribué à la création d’importantes organisations communautaires et de défense des droits, elle continue aujourd’hui de s’impliquer bénévolement en occupant des fonctions de responsabilité au sein de ses communautés.
cindy-baker.ca

Tamyka Bullen est une artiste et performeuse sourde. Militante pour la justice sociale, elle a travaillé bénévolement avec des jeunes, des femmes sourdes, des personnes immigrées et des personnes issues de la communauté LGBTQ. En 2015, elle a joué dans la dernière production du RARE Theatre, After the Blackout, créée par Judith Thompson. Parmi ses autres réalisations, Bullen a participé à l’exposition Hidden en 2020 à la Galerie Tangled Art + Disability de Toronto. Cette même année, sa performance Spiral Life a été présentée dans le cadre du Rhubarb Festival et du SOUND OFF festival, en 2022. Fin 2023, elle a performé à Montréal aux côtés des membres du collectif de femmes noires sourdes Survivance lors des soirées de performance La diversité capacitaire fait vibrer la culture ! organisées par la Chaire de recherche du Canada sur la citoyenneté culturelle des personnes sourdes et les pratiques d’équité culturelle.

Liz Crow est une personne handicapée et une artiste activiste qui œuvre dans les domaines de la performance, du film, de l’audio et du texte, intéressée par le pouvoir du travail créatif comme outil de changement. Ancienne titulaire d’une bourse National Endowment for Science, Technology and the Arts (NESTA) et fondatrice de Roaring Girl Productions, elle a obtenu un doctorat orienté vers la pratique sur les possibilités de développement de la portée et de l’influence du militantisme. Le travail de Liz a été exposé à la Tate Modern, au British Film Institute, au Kennedy Center de Washington DC et sur le Fourth Plinth de Trafalgar Square. Parmi ses projets, citons l’installation cinématographique itinérante Resistance: which way the future? qui examine le programme nazi de massacres ciblant les personnes handicapées, en s’interrogeant sur les résonances et significations de cette histoire aujourd’hui. Figures, une performance sculpturale à travers laquelle l’artiste matérialise le coût humain du programme d’austérité mis en place par le gouvernement britannique et appelle à prendre des mesures pour le contrer. Liz travaille actuellement sur une réponse créative aux questions de climat et de handicap dans le cadre du projet Sensing Climate de la University of Exeter.

Octavia Rose Hingle (il/elle/iel) est chorégraphe et artiste qui pratique l’installation, originaire de la région de la baie de San Francisco et ayant une incapacité physique. Son travail de performance porte sur l’accessibilité en tant que portail esthétique vers des visions d’ancêtres du passé et du futur qui voyagent à travers le moment présent. Plus récemment, son projet Crip Ecstasy a rassemblé des artistes de performance vivant avec un handicap ou non, des graphistes, des DJ et des prestataires de services d’accès afin de concevoir de nouveaux modèles possibles d’espaces de vie nocturne. Octavia détient un BA en danse du Middlebury College, et a étudié avec ODC/Dance, le UCLA Dancing Disability Lab, AXIS Dance Company’s Choreo-Lab Fellowship, et le Headlong Performance Institute. Son travail a été présenté par Counterpulse, Roots Division, 2727 California Street, Queering Dance Festival, LEVYdance et SAFEhouse for the Performing Arts.
vimeo.com/octaviarose

Salima Punjani est une artiste multisensorielle ancrée dans l’esthétique relationnelle. Le fil conducteur de tout son travail est la création d’environnements qui permettent la réceptivité et la connexion. Ses travaux récents explorent des thèmes tels que les processus d’isolement et de resocialisation liés à la COVID-19, au repos comme résistance à l’injustice systémique et à la manière dont les données médicales peuvent être détournées pour trouver des liens humains plutôt que des anomalies qui nous séparent.
cargocollective.com/salima

Rea Sweets est une artiste multidisciplinaire qui vit à Toronto. Naviguant entre intimité, identité et imagination par des médiums matériels, des performances et des supports interactifs, Sweets explore les enchantements cosmiques ainsi que les entraves de la numérisation. Elle a travaillé avec Margin of Eras Gallery, Akin Collective et a exposé ses œuvres à Charles Street Video, Trinity Square Video, Dames Making Games, Myseum of Toronto et Gladstone House. Elle est la cofondatrice de PRUDEmag, un zine destiné aux personnes célibataires, celles qui imposent leurs règles, les asexuelles, les anarchistes relationnelles, et à toutes celles qui refusent une culture fondée sur la nécessité du sexe. Le zine revendique le terme « prude » comme une célébration de l’autonomie et de la définition des limites, et une libération dans laquelle le « non » est sacré.
reasweets.com

À propos de la commissaire
Sarah Heussaff est titulaire d’un Master en commissariat d’exposition de l’Université Rennes 2, France. De 2014 à 2019, elle entame des recherches dans le domaine des études critiques du handicap via des chroniques en ligne. Ses recherches sont alors aussi présentées en France et à l’étranger à travers des conférences, des ateliers et d’une exposition (Autonomous Spaces, Ateliers du Vent-Rennes, 2017) qui introduit, aux côtés de Zig Blanquer, les pratiques artistiques handicapées émancipées. Fin 2019, elle entame une recherche doctorale dans le programme de communication de l’UQAM. En 2023, sa recherche, financée par le Fonds de Recherche du Québec-Société et culture (FRQSC), se concentre sur l’émergence des arts handicapés en relation avec les mouvements activistes handicapés ainsi que le commissariat d’exposition accessible. Dans sa méthode de recherche et dans ses références, elle accorde une grande importance aux personnes qui ont l’expertise par l’expérience.

Activités publiques (invitation en LSQ)

Performance de l’artiste Tamyka Bullen
Samedi 24 février 2024, de 12 h 30 à 13 h 15
Galerie de l’UQAM
ASL, adaptation lue en français par Sendy-Loo Emmanuel
Entrée libre

Dans la performance, le lit et son chevet sont symbolisés par un dernier recueillement, un ultime témoignage d’une fille à sa mère, souffrante. Jimena, le personnage du récit, est une femme sourde de 40 ans qui nous livre, en colère, sa relation contrariée avec une mère distante. Elle nous raconte la séparation entre deux mondes : celui des personnes entendantes et celui des personnes sourdes.

Performance de Cindy Baker
Samedi 24 février 2024, de 14 h à 17 h
Galerie de l’UQAM
Audiodescription en français de 14 h à 15 h par Letizia Binda-Partensky
Entrée libre

Cindy Baker réalise une performance de 3 heures durant lesquelles elle interagit avec l’installation CRASH PAD présentée dans l’exposition. Le travail de l’artiste se situe à l’intersection des Queer, Gender, Race, Disability et Fat Studies, et prend en considération les ressources corps-esprit, sa fatigabilité et sa résistance au moment des performances. La première heure de la performance est audiodécrite en français.

Conversation sur l’oreiller avec Salima Punjani
Samedi 2 mars 2024, de 14 h à 15 h 30
Galerie de l’UQAM
Français, LSQ
Entrée libre

Salima Punjani convie le public à une rencontre pour présenter sa démarche artistique et activer l’installation exposée dans la Galerie. À cette occasion, le public est invité à participer à une séance d’écoute et de repos collectifs et à une discussion informelle avec l’artiste.

Visite de l’exposition en présence de la commissaire
Vendredi 8 mars, de 12 h 30 à 13 h 30
Galerie de l’UQAM
Français
Entrée libre

Dans le cadre de la série L’art observe, la Galerie de l’UQAM vous invite à une visite conviviale de l’exposition De la vie au lit organisée avec la commissaire Sarah Heussaff. Cette activité sera l’occasion d’échanger avec le public autour des thématiques soulevées par l’exposition.

Atelier de danse au lit
En partenariat avec le Studio 303
Samedi 16 mars 2024, de 14 h à 15 h 30
En ligne
Anglais, ASL, LSQ

Places limitées, inscription requise (des places prioritaires sont réservées pour les personnes sourdes ou malentendantes)

Gratuit

Dans cet atelier, Octavia Rose Hingle se base sur sa technique de danse au lit pour proposer des stratégies afin d’explorer le plaisir et les possibilités des surfaces douces de nos espaces domestiques. Les danseuses et danseurs, handicapés et non handicapés, de tous horizons, sont invités à trouver leurs propres interprétations des principes fondamentaux de la danse contemporaine à partir de leur lit, de leur canapé ou du sol.

Lecture de chevet
Mardi 2 avril 2024, de 10 h 30 à 11 h 30
En ligne sur la plateforme Zoom
Français, supports écrits en français et en anglais sur Framapad
Entrée libre

La commissaire de l’exposition Sarah Heussaff invite le public à une lecture alitée dans l’installation Bedding Out et diffusée en ligne. Elle y lit le texte de la vidéo présentée dans l’exposition et le texte S’allonger quoi qu’il en soit, une auto-ethnographie de Liz Crow. Tout en embrassant les stagnations et les mobilités handicapées et malades, l’autrice décrit l’inconfort et les jugements qui sont renvoyés dès que l’acte de s’allonger est performé dans l’espace public.

Offre éducative

Les personnes responsables de la médiation de la Galerie de l’UQAM se feront un plaisir d’accueillir les groupes et le corps enseignant pour des visites commentées de l’exposition De la vie au lit. Souples et ouvertes à tous les groupes scolaires et communautaires, ces visites peuvent être adaptées aux besoins particuliers et s’inscrire en dialogue avec la matière abordée en classe, le cas échéant. Ces activités sont offertes sans frais, en français ou en anglais. Une ou un interprète en LSQ ou en ASL peut être mise à la disposition des groupes souhaitant visiter nos expositions avec des personnes sourdes ou malentendantes. Merci de prendre contact avec notre équipe le plus tôt possible étant donné les délais de réservation.

+ Plus d’informations : galerie.uqam.ca/offre-educative/visites-en-salle/

Réservations requises :
Léa Lanthier-Lapierre
Responsable de la médiation et des communications, Galerie de l’UQAM
lanthier-lapierre.lea@uqam.ca
514 987-3000 p. 20959

Partenaires

Adresse et heures d’ouverture
Galerie de l’UQAM
Pavillon Judith-Jasmin, salle J-R120
1400, rue Berri, angle Sainte-Catherine Est, Montréal
Métro Berri-UQAM

Mardi — samedi, 12 h – 18 h

Entrée libre

Renseignements
Tél. : 514 987-6150
galerie.uqam.ca / Facebook / Instagram

VERSION ANGLAISE

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Source 
Julie Meunier
Conseillère en communication
Division des relations avec la presse et évènements spéciaux
Service des communications, UQAM
Cell. : 514 895-0134
meunier.julie@uqam.ca

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